AFP-Les Echos: La suspension de la vente du Mistral suscite un concert de réactions disparates

Washington salue "une sage décision", EELV applaudit. Le PS insiste sur le mot "suspension". Jean-Luc Mélenchon parle de " trahison", les syndicalistes de STX de "scandale". Le député UMP Henri Guaino fustige une décision "inutile".  

Paris a suspendu mercredi la vente du "Vladivostok" à la Russie.

Publié le 4 sept. 2014 à 10:18

A la veille du sommet de l’Otan qui se déroule aujourd’hui et demain au pays de Galles, Paris a fait connaître à Moscou sa décision de suspendre la livraison du premier navire Mistral. Au vu de la situation en Ukraine, les conditions  ne sont par réunies « à ce jour », a estimé l’Elysée. Une décision qui a suscité de nombreuses réactions.

Le contrat avec la Russie, portant sur deux porte-hélicoptères "BPC" (pour Bâtiment de projection et de commandement), a été signé en 2011 pour 1,2 milliard d'euros. La construction du premier navire, le "Vladivostok", par les chantiers STX de Saint-Nazaire est presque achevée (il devait être livré en octobre), le deuxième navire est en cours d'assemblage.

Thierry Mandon, secrétaire d'Etat à la Réforme de l'Etat

"C'est une suspension de la livraison. Les mots comptent. La France veut forcer à l'accord de paix aujourd'hui entre les Ukrainiens et, de fait, les Russes qui ont de l'influence voire plus là-bas, et cette décision participe de cette volonté de créer les conditions de l'arrêt des combats", a déclaré Thierry Mandon jeudi sur RFI. Selon lui, François Hollande "n'a pas cédé" aux pressions de ses alliés. Mais "ce n'était pas une position facile. On pouvait difficilement en même temps condamner l'URSS (sic) et, en même temps, ne rien faire. C'est un point moyen qui vient juste au bon calendrier; d'ailleurs il est probable que dans les heures qui viennent, enfin les choses s'apaisent en Ukraine", a poursuivi le secrétaire d'Etat, rattaché au Premier ministre Manuel Valls

Jean-Marc Perez, secrétaire adjoint FO chez STX

« C’est une réaction de stupéfaction et de scandale », a déclaré mercredi à l’AFP Jean-Marc Perez, secrétaire adjoint FO, syndicat minoritaire chez STX, qui sous-traite la construction des deux bâtiments Mistral pour le compte de DCNS. « Si l’annonce du président se concluait par l’arrêt de la construction, ce seraient des centaines d’emplois qui seraient mis en difficulté aussi bien chez STX que chez les sous-traitants. C’est inacceptable, intolérable », a-t-il ajouté.

Johan Jardin responsable de la CFDT-STX,

« C’est une décision qui pouvait arriver à tout moment », a commenté de son côté un responsable de la CFDT-STX, Johan Jardin. « On ne peut que la regretter, mais on peut aussi la comprendre », vu le contexte international et la situation en Ukraine. « Quel impact ça aura  ? Nous, on n’est que sous-traitants. On va livrer le navire à la DCNS et on verrra ce qu’elle va faire ». « La question qui se pose porte sur ce qui va être décidé pour le deuxième » Mistral, a poursuivi le responsable de la CFDT, deuxième syndicat chez STX après la CGT. « Maintenant se pose la question +qui va payer le bâtiment+ (...) il faut que la DCNS nous dise si on continue ou pas ».

Jean-Luc Mélenchon, député européen, Parti de gauche

« En décidant de renoncer à la livraison des navires acquis par la Russie, François Hollande commet une trahison insupportable qui dévalorise totalement la parole donnée par notre pays et raye la France comme fournisseur indépendant de matériel de défense. Mesure sans signification militaire dans le conflit actuel, cette décision achève la vassalisation de notre pays à la main des USA et de la politique belliqueuse de l’Otan » (communiqué).

Jean-Vincent Placé, sénateur EELV

« Enfin! C’est tout de même incroyable qu’on ait tant tardé. Mieux vaut tard que jamais. Nous, écologistes, le disons depuis le début de la crise ukrainienne (...) On arrive à un moment où il faut être assez précis dans le rapport de forces. Et le rapport de forces, il redevient militaire » (i-Télé).

Henri Guaino, député UMP des Yvelines

"Je ne suis pas sûr que la stratégie de la tension croissante avec la Russie soit la meilleure stratégie possible. (...) On ne peut pas traiter la Russie avec désinvolture. Il convient de discuter et de négocier (...) Les sanctions ne feront rien Prendre cette décision renvoie à des difficultés considérables ", a déclaré le député des Yvelines jeudi matin sur France Inter.

Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la République

« En quoi la non-livraison du Mistral par la France pourrait avoir un quelconque effet sur la position russe dans le conflit ukrainien? La France doit avoir une parole indépendante afin d’entamer un dialogue respectueux, ferme et responsable avec la Russie. Ce n’est pas en refusant d’honorer un contrat et donc en faisant preuve d’irresponsabilité qu’elle y arrivera. Rappelons que cette suspension pourrait mettre en péril des milliers d’emplois, dans un secteur stratégique pour notre pays ».

Pierre Lellouche, député UMP.

"Cette décision est désolante parce qu'elle souligne l'absence totale de cap côté français sur l'affaire ukrainienne", a-t-il observé jeudi sur i>Télé. "Soit on utilisait le Mistral comme levier, alors dans ce cas-là il fallait le faire il y a des mois, mais se coucher à la veille du sommet de l'Otan, ça ne rapporte rien, les alliés vont nous mépriser, les Russes aussi", a-t-il ajouté.

Florian Philippot, vice-président du FN

« Si vraiment Hollande envisage de ne pas livrer les Mistral alors il ruine la crédibilité de la France dans le seul but d’obéir à Washington ».

De son côté, la présidente du FN, Marine Le Pen, a elle aussi critiqué une "décision très grave". Jeudi sur RTL, l'eurodéputée a évoqué une "décision très grave parce qu'elle révèle notre soumission à la diplomatie américaine (...) C'est à la demande de Barack Obama que François Hollande a pris cette décision". "Très grave" aussi "pour la valeur de la parole de la France dans les échanges commerciaux", a-t-elle poursuivi.

Yannick Jadot, député européen EELV

« La suspension de cette livraison n’est qu’une première étape qui doit conduire la France à prendre l’initiative d’accélérer la mise en place d’une politique européenne de défense digne de ce nom, politique dans laquelle les BPC trouveront toute leur place. La sécurité de l’Europe impose une mutualisation des coûts d’une telle mesure. Nous demandons que les pays européens sortent de leurs ambiguïtés vis-à-vis de la Russie, ambiguïtés qui affaiblissent considérablement la crédibilité des sanctions européennes ».

Jennifer Psaki, porte-parole du département d’Etat américain

Elle a repris les termes du communiqué de la présidence française annonçant la suspension du contrat, pour exprimer mercredi soir « le soutien » de Washington. « Nous pensons que c’est une sage décision », a-t-elle commenté. A la Chambre des représentants, le patron des démocrates de la commission des Affaires étrangères, Eliot Engel, s’est aussi félicité d’une « décision du gouvernement français qui envoie un signe fort de démocraties occidentales se tenant côte à côte face à l’agression du président (russe Vladimir) Poutine » contre Kiev « Cela aurait été mieux d’annuler (le contrat), mais l’ajourner est un bon premier pas », a insisté dans un tweet l’influent sénateur républicain John McCain, candidat à la présidentielle de 2008. 

Bernard Grua, membre du comité "No Mistrals for Putin"

"Nous voulons une annulation pure et simple" du contrat, a déclaré à l'AFP Bernard Grua, membre du comité "No Mistrals for Putin" ("Pas de Mistral pour Poutine") qui a organisé des manifestations contre la vente des bâtiments à la Russie à la suite de la crise ukrainienne. Son mouvement prévoit toujours de manifester dimanche à Saint-Nazaire où les deux navires sont assemblés par les chantiers navals STX. Les opposants exigent aussi le départ du Smolny, un navire de guerre à bord duquel 400 marins russes sont venus afin de se former à Saint-Nazaire au maniement des deux nouveaux bateaux.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Polish Activists Call For Boycott Of French Arms Industry If The Mistral Is Delivered To Russia

Российский экипаж вертолетоносца "Владивосток" оказались во Франции на осадном положении / The Russian crew of the Vladivostok helicopter carrier found themselves in a state of siege in France